Burkina Faso: Renforcement du Leadership féminin: Une approche pour promouvoir la représentation et la visibilité des femmes dans les instances de décision des Collectivités Territoriales

Le « Programme Décentralisation et Développement Communal (PDDC) » est un programme de la coopération allemande, exécuté par la GIZ, qui travaille avec des partenaires étatiques et de la société civile au Burkina Faso.

 

L’approche présentée relève de la Composante 2 qui traite des relations entre les communes et la société civile.

 

  1. Quelle est la situation par rapport à l’égalité entre femmes et hommes au Burkina Faso ?

En termes juridiques et législatifs, le Burkina Faso est un pays moderne en ce qui concerne le Genre. Une Politique Nationale Genre (PNG) existe depuis 2009 et donne des orientations à travers des axes d’intervention et des objectifs précis à tous les niveaux. Mais en réalité, l’on constate qu’ils persistent de multiples défis, notamment en ce qui concerne la situation des femmes et des filles pour atteindre une réelle égalité entre les hommes et les femmes. Ceci se manifeste visiblement si on regarde les taux de représentation des femmes dans les instances et espaces de prise de décision au niveau communal. Selon les statistiques des élections municipales de 2006 et de 2012, il ressort que dans les deux régions d’intervention du Programme, l’Est et le Sud-ouest, le taux de femmes élues est très faible et a même connu une décroissance en 2012 comparativement à l’année 2006.

 

A cette faible représentation, s’ajoute le contexte culturel et sociétal qui ne favorise pas une participation active et efficiente des femmes dans les cadres de prise de décision : Toujours face à une prédominance d’hommes, la prise de parole, la défense d’arguments pour leurs intérêts et l’audibilité des femmes reste souvent limitée. En outre, la confiance des femmes en elles-mêmes et de leur entourage pour assumer un poste de responsabilité constitue un blocus.

Les 30 et 31 octobre 2014, le Burkina Faso a vécu une insurrection populaire qui a fait chuter Blaise Compaoré, Président du pays depuis 27 ans. Suite à ce changement de pouvoir, des organes de transition ont été mis en place à tous les niveaux. Si la représentation des femmes était faible avant, l’arrivée de ces « délégations spéciales » les a fait quasiment disparaitre de la scène politique. Les membres des Délégations spéciales sont nommés, il s’agit de représentant/es de services techniques locaux, de représentant/es des chambres de commerce/ d’agriculture – la vaste majorité des hommes. Souvent, on ne trouve qu’une seule femme – représentante des associations féminines – en sein de l’organe.

L’approche développée donne un appui pour pallier ces insuffisance et encourage le développement personnel et les capacités stratégiques des femmes leaders et celles qui veulent renforcer leur leadership.

 

  1. Objectif et démarche

L’approche « Renforcement du leadership féminin » a pour objectif de créer un espace d’échanges et de soutien entre femmes élues et femmes engagées dans la vie communale. Au cours de plusieurs rencontres successives, elles

Ø échangent autour de leurs expériences vécues en tant que femmes et usagers féminines des services communaux avec des besoins spécifiques dans les instances communales

Ø se donnent des recommandations et du feedback

Ø s’exercent dans un espace « protégé » entre femmes en prise de parole, tenue d’un discours politique, rhétorique

Ø développent des liens de réseautage et de soutien mutuel (au-delà du cadre des partis politiques et des provinces) avec pour objectif global de faire avancer les intérêts des femmes et des populations dans leurs communes. Pour la plupart des femmes, l’occasion de se retrouver entre elles pour échanger et de s’exprimer devant une caméra lors des travaux pratiques était une première.

 

  1. Comment se déroule le processus ?
  2. Phase préparatoire

v A travers des échanges avec les autorités communales, les organisations de la société civil (OSC), les Coordinations communales des femmes et les médias locaux, les femmes leaders, élues, femmes dynamiques en sein des communes et des médias sont identifiées en tant que groupe cible.

v Recherche d’une équipe de personnes ressources pour l’animation des activités (un/e expert/e en communication/ prise de parole, une femme leader experte en leadership féminin)

 

  1. Phase d’exécution

v Première session : Faire connaissance, créer une atmosphère de confiance. Partage des problèmes/ difficultés et acquis vécues dans l’exercice de leurs tâches et rôles dans la prise de décision, dans leur participation dans les cadres d’échanges, au quotidien. Elaboration de stratégies et recommandations pour la maîtrise de situations difficiles et de développement personnel.

v Deuxième session (et éventuelle troisième session, 3-6 mois après la première) : Evaluation des expériences faites depuis la première session. Quelles étaient les difficultés dans la mise en œuvre des stratégies développées ? Entrainement pratique pour la prise de parole en public (comportement face aux médias, comment se préparer à une interview, comment préparer un plaidoyer, tenue d’un discours politique, comment surmonter le trac). Les participantes se préparent en groupe par rapport à des tâches précises. Par la suite, la « candidate » choisie par son groupe est filmée pendant sa présentation. Le public évalue et donne un feedback constructif. Les témoignages et modules concrets sur le leadership féminin – qualités d’une femme leader, stratégies pour améliorer son leadership – des personnes ressources ayant occupé des postes de responsabilité au niveau national et/ou international servent d’orientation et d’encouragement pour les participantes. Elles donnent un conseil pour la mise en réseautage des femmes pour mieux défendre les intérêts des populations dans les espaces de prise de décision.

 

III. Mise en échelle

v Des participantes qui se sont distinguées positivement lors des travaux pratiques préparent et animent en direct des émissions radiophoniques interactives en français et en langues locales sur le leadership féminin, sur des conseils à des femmes souhaitant s’engager en politique dans leur communauté. Les auditrices et auditeurs peuvent appeler en direct pour poser des questions et donner leur avis selon les thématiques de la présentation.

 

Les défis et insuffisances Le caractère collégial des sessions nécessite des relations de confiance et d’ouverture des femmes participantes. Ainsi, il faut accorder un temps suffisant pour permettre à la dynamique du groupe de se développer. Aussi, le fait de travailler avec une caméra nécessite une logistique et du temps suffisant pour les aspects techniques de l’évaluation commune. La mise de côté des affinités politiques est une précondition à clarifier et à veiller dessus.

 

  1. Résultats

 

En tant que résultats immédiats, depuis la première activité réalisée en 2014, certaines participantes ont accepté occuper des postes de vice-présidentes au niveau de la délégation spéciale dans la phase de transition. D’autres se sont engagées à la faveur des élections législatives. Des femmes des coordinations communales ont témoigné avoir partagé le contenu de la formation avec les autres membres de la coordination communale des femmes qui étaient impressionnées par la façon dont elles s’exprimaient aisément ainsi que la manière de poser les problèmes vécus par les femmes dans leur grande majorité. Concernant le milieu associatif, un témoignage a été fait par une femme d’une des communes rurales qui suite à la formation a développé des stratégies avec les autres femmes pour une forte représentation des femmes au niveau du bureau de la coordination communale des OSC de cette commune (8 femmes et 4 hommes). L’on note aussi une forte participation des femmes et des citoyennes et citoyens aux émissions radiophoniques interactives.

 

Les élections municipales au Burkina Faso sont prévues au premier trimestre 2016.

Certainement, un résultat attendu est une plus forte représentation de femmes dans les instances élues au niveau communal. Une fois élues, un appui continuera à travers des conseils et du mentorat entre femmes élues dans les différentes communes est envisagé pour continuer le processus entamé et renforcer les capacités pour la prise en compte des besoins spécifiques des hommes et des femmes dans les processus de planification et développement communal.

 

  1. Eléments de suivi-évaluation

Ø Les contributions et témoignages lors des formations sont documentés, ainsi que les résultats des exercices pratiques.

Ø Sur le terrain, lors des rencontres avec des acteurs au niveau communal et avec les femmes ayant participées aux activités, l’on reçoit le feedback concernant les variations de comportements.

Ø Le service technique déconcentré pour la Promotion féminine et le Genre est associé lors des actions et des émissions pour assurer la qualité et exactitude du contenu des modules et de la méthodologie.

 

  1. Replicabilité L’approche a été réalisé dans deux régions culturellement différentes du Burkina Faso – l’Est et le Sud-ouest. Le contenu des modules déroulés et les tâches des travaux de groupe peuvent flexible être adaptés aux besoins d’autres contextes culturels. Les documents accompagnant le processus étant disponible, ceci pourra faciliter le transfert de l’approche dans d’autres régions ou pays.

 

  1. Coopération En vue d’atteindre les objectifs, le Programme s’est appuyé sur plusieurs acteurs étatiques et non étatiques : collectivités territoriales (communes, région), les Oraginsations de la socite civiel (OSC), les médias, les services techniques déconcentrés en charge de la mise en œuvre de la Politique Nationale Genre, les coordinations communales des femmes, les femmes élues, femmes leaders et citoyennes dynamiques des communes. Comme ça les approches « multi niveaux « (niveau local, régional, national) et « multidimensionnelle » (acteurs de l’Etat, communauté, secteur privé et de la société civile) de la GIZ ont été assuré. Au niveau de la GIZ BFA, le Programme a bénéficié de l’accompagnement de la conseillère genre et des points focaux genre du Programme.

 

  1. Trois principaux facteurs de réussite

 

ü Présence et disponibilité de personnes ressources nationales à partager leurs expériences en tant que femmes leaders et connaissant les réalités vécues sur le terrain (ayant occupé des postes de responsabilités tant au niveau national qu’international)

ü Formations pratiques et flexibles visant le développement personnel et les valeurs de soutien mutuel et de solidarité

ü La variété des actrices impliquées et la diversité des canaux utilisés pour approfondir les travaux pratiques et la diffusion des informations en utilisant des différentes langues

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